ARTS & CRISE 2020-2021
L’ÉCONOMIE À L’ŒUVRE
Production, représentation et réception de l’économie dans les arts
Programme séminaire INHA, salle Walter Benjamin
Partenariat Paris 8 – Paris 1 / Art&Flux – Paris Nanterre
Séminaire ArTec – Master 2
Histoire économique – Spectacle vivant – Arts plastiques
Patrice Baubeau – Martial Poirson – Yann Toma
Lundi 17h00 – Année 2020/2021
ARGUMENTAIRE
Ce séminaire interdisciplinaire porte sur les relations entre les arts et l’économie d’hier à aujourd’hui. En effet, les formes de production, de représentation et de réception de l’économie à travers les âges sont indissociables du système économique de leur temps, sans en être pour autant une simple transposition : la mise en fiction de l’économie, sa réalité parfois portée à la critique, sublimée ou transformée par l’art, autorisent de subtiles stratégies d’infiltration, de détournement, de subversion de l’attribution de la valeur, voire de nouvelles perspectives pour l’économie elle-même. Elles attestent d’un rapport de fascination et de répulsion mutuelle entre l’art et l’argent. Ce dialogue complexe ne s’éclaire qu’en interrogeant la position des œuvres, des artistes et des publics, mais aussi, de façon symétrique, les modalités de captation des œuvres et des services culturels au sein de l’activité économique proprement dite. Le travail créateur s’insère ainsi dans la production de valeur comme dans ses processus de créance, tout en interrogeant ses modalités d’évaluation, de distribution ou d’appropriation, sous leurs formes économiques, sociales, politiques, culturelles et symboliques. Le séminaire articulera lecture de textes canoniques, paroles de penseurs issus de différentes disciplines, expérimentations d’artistes contemporains de différents domaines et rencontres avec des acteurs du monde de l’économie. Trois aspects seront privilégiés : Les modèles de production, de réception et de médiatisation de l’économie ; les usages artistiques de l’économie ; les usages économiques de l’art.
Séminaire en partenariat avec la Banque de France, le service culturel de la Mairie de Paris, le département des Monnaies, médailles et antiques de la Bibliothèque nationale de France, la Cité de l’économie et de la monnaie et la revue Pour l’éco.
MODALITÉS D’ÉVALUATION
Présenter une démarche artistique en résonance avec une ou deux des séances du séminaire (15 pages). Cette proposition pourra inclure plusieurs œuvres.
SYLLABUS PRÉVISIONNEL
28 septembre, 5 octobre, 12 octobre, 19 octobre, 2 novembre, 9 novembre, 16 novembre, 23 novembre, 30 novembre, 7 décembre, 14 décembre, 11 janvier, 18 janvier
Séance 1 (lundi 28 septembre) – Introduction générale – Approches de la production
Lecture d’accompagnement : Luc Boltanski et Arnaud Esquerre, « La collection, une forme neuve du capitalisme. La mise en valeur économique du passé et ses effets », Les Temps modernes n°679, 2014/3, p. 5-72 ; Walter Benjamin, Charles Baudelaire. Un poète lyrique à l’apogée du capitalisme [1923], Paris, Payot, 1982 ; Daniel Bell, Les contradictions culturelles du capitalisme [1976], Paris, PUF, 1979 ; Fredric Jameson, La Postmodernité ou la logique culturelle du capitalisme tardif, trad. Florence Nevoltry, Paris, Beaux Arts de Paris Éditions, 2011 ; Gilles Lipovetsky et Jean Serroy, L’Esthétisation du monde. Vivre à l’âge du capitalisme artiste, Paris, Gallimard, 2013 ; Yann Moulier-Boutang, Le capitalisme cognitif, Paris, Éditions Amsterdam, 2007.
Panorama de la littérature et des références artistiques clés.
Livret de textes accompagnant le cours
Problématiques et organisation du séminaire.
La nouvelle bataille des tulipes : controverse autour de Jeff Koons
Séance 2 (lundi 5 octobre) – Dramatisation de l’écologie
Invités : Frederic Fisbach, Charlotte Farcey, Théâtre de la Colline
Lecture d’accompagnement :
Spectacle d’accompagnement : Vivre, En votre compagnie. Inspiré par Le Mystère de la charité de Jeanne d’Arc de Charles Péguy, Théâtre de la Colline, 9 sept-25 oct., dates réservées les 1, 2, 3 octobre
Spectacle portant sur l'impact écologique des spectacles et la conception possible d’un théâtre éco-responsable. Quels modèles de production pour le théâtre en temps de crise ? F. est metteur en scène, il meurt en 2020 quelques semaines avant le début des répétitions du Mystère de la charité de Jeanne d’Arc de Charles Péguy. Six ans plus tard, les actrices décident de reprendre le projet et les répétitions, auxquelles la mère de F. assiste. Quelles raisons ont ces femmes pour reprendre ce projet, à entamer un travail d'archive et de mémoire dans les carnets de travail de F. ? L'année 2026 est plongée dans le chaos, écologique et social. Reprenant la question qui tourmentait déjà F., les actrices réfléchissent à la place de la poésie dans un monde où tout n'est qu'urgence. Y-a-t-il de la place pour ces mots insoumis, ces odes à l'espoir sans bornes prononcées au bord de l'abîme ? Dans ce monde déjà tourmenté, un cataclysme se produit et détruit tout. Les morts prennent la parole. La mère de F. apparaît comme la dernière survivante qui erre dans les ruines du théâtre. Devenant spectatrice presque inconsciente d’une parole poétique qui refuse de se soumettre, l'agonie et la mort nous parlent de notre propre vie.
Séance 3 (lundi 12 octobre) : Théâtre en temps de crise
Invitée : Anne de Amerzaga, co-directrice de la Compagnie Louis Brouillard-Joël Pommerat
Lecture d’accompagnement : Dossier pédagogique du spectacle (fourni par l’artiste) ; Bérénice Hamidi-Kim, Les Cités du théâtre populaire en France depuis 1989, l’Entretemps, 2013 ; Bérénice Hamidi-Kim et Séverine Ruset (dir.), Troupes, compagnies, collectifs dans les arts vivants. Organisation du travail, processus de création, L’Entretemps, 2018.
Spectacle d’accompagnement : Contes et légendes, 8 sept.-10 octobre, Théâtre des Bouffes du Nord
Articulation entre théâtre public et théâtre privé, administration de compagnie, statut d’artiste, système socio-économique des spectacles, production et diffusion internationale, compagnie à rayonnement national, autant de questions abordées par cette rencontre, animée par une des plus grandes professionnelles innovantes dans le domaine des arts vivants.
Séance 4 (lundi 19 octobre) : Le capital au XXI siècle
Invité : Emmanuel Picavet, philosophe, Université Paris 1
Lectures recommandées : Yann Toma (dir.), Les entreprises critiques/Critical companies, Cité du design Éditions/CERAP Éditions, 2008 ; Luc Boltanski et Ève Chiapello, Le Nouvel esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, 1999.
Descriptif
Pas de séance le 26 octobre
Séance 5 (vendredi 6/12 novembre, horaire à définir : 10h ?) : Médiatisations de l’économie
Rendez-vous : Citéco, 1 Place du Général Catroux, 75017 Paris, Métro Malesherbes. Visite-conférence déambulatoire dans les collections permanentes et l’exposition Largo Winch de la Cité de la monnaie et de l’économie, institution muséographique fondée en dans un établissement patrimonial à haute valeur symbolique ajoutée, l’Hôtel Gaillard, sous l’égide de la Banque de France. Une occasion d’interroger les médiations de l’économie au sein de nos sociétés multi-médiatiques.
Séance 6 (lundi 2 novembre) : (Yann)
Invité : Victor Chaix.
Lectures recommandées :
Descriptif
Séance 7 (lundi 9 novembre) : : (Yann)
Invité : Stephen Wright
Lectures recommandées :
Descriptif
Séance 8 (lundi 16 novembre) : El dorado (Yann)
Invité : Jean-Marie Dallet, Arts plastiques, affiliation ?
Lectures recommandées : Jean-Louis Boissier, La 3e biennale de Lyon, cédérom, direction des réalisations : Jean-Marie Dallet ; production - distribution : Réunion des Musées Nationaux, France, 1995. Jean-Marie Dallet, Update_1. Origine, catalogue de l’exposition, fondation Liedts-Messen, Gand, Belgique, couleur, 2006. Jean-Marie Dallet (dir.), Cinéma, interactivité et société, université de Poitiers & CNRS, 2013, 424 p., couleur, 2013. Jean-Marie Dallet, Mémoires vives. From Nam June Paik to SLIDERS_lab, catalogue de l’exposition, fondation Liedts-Messen, Gand, Belgique, 256 p., couleur, 2019. Jean-Marie Dallet, Bertrand Gervais (dir.), Architectures de mémoire, Presses du réel, Grande collection ArTeC, 256 p., noir et blanc, 2019.
Jusqu’à une période récente, les artistes labellisés « nouveaux médias », c’est-à-dire pour éclaircir l’expression travaillant de manière privilégiée avec le médium informatique comme le moyen naturel d’interroger la société de l’information à l’ère du numérique, se trouvèrent confrontés à un problème de financement récurrent et d’accueil dans des structures capables de soutenir leur démarche et leur production. Plaçant cette intervention sur le mode autobiographique, je raconterai une histoire des lieux et des institutions qui depuis le début des années 90 ont permis ou non l’émergence de mes créations et les stratégies élaborées pour les financer.
Séance 9 (lundi 23 novembre) : De modestes propositions » Petits traités d’économie rédigés par des artistes
Invitée : Sophie Cras, Université Paris 1.
Lecture d’accompagnement : William Morris, "Travail utile et vaine besogne," dans La civilisation et le travail, Le passager clandestin, 2013 ; Yves Klein, « Esquisse et grandes lignes du système économique de la révolution bleue » in Le dépassement de la problématique de l’art et autres écrits, édité par Marie-Anne Sichère et Didier Semin, ENSBA, 2003.
Qu’advient-il de l’économie lorsqu’elle est pensée, inventée, rêvée par les artistes ? On le sait peu, mais nombreux furent les artistes qui, de la fin du 19e siècle jusqu’à aujourd’hui, se firent un temps économistes et rédigèrent de véritables petits traités ambitionnant de renouveler la discipline. Cette contribution se propose de traverser ces textes et d’en explorer la portée d’aujourd’hui. Qu’ils aient suivi une formation universitaire en économie (tel Vassily Kandinsky ou Robert Filliou), qu’ils aient construit leur conception théorique de l’art en dialogue avec des économistes (comme William Morris ou Joseph Beuys), ou qu’ils aient élaboré un système théorique à part entière (à l’instar d’Asger Jorn ou d’Isidore Isou), ces artistes nous livrent une vision riche et singulière, tant sur la pensée économique de leur temps que sur les enjeux d’aujourd’hui.
Séance 10 (lundi 30 novembre) : Iconoclash : la destruction d’œuvres d’art ou de monuments commémoratifs
Invité : Marcel Dorigny, Professeur émérite université Paris 8
Document d’appui :
Dégradations de statues ou d’œuvres d’art héritées de l’âge colonial, renomination de rues marquées par des personnalités liées à cette histoire, appel au boycott d’œuvres d’art visant à solliciter, même de façon critique, cet héritage… Il semble que la politique de la mémoire fasse débat, en ce début de nouveau millénaire, partagé entre devoir de mémoire envers les traumatismes de l’histoire collective, appel à une forme de réparation symbolique et procès rétrospectif des exactions de la période coloniale et esclavagiste.
Séance 11 (lundi 7 décembre) : Le « travail » artistique et l’esthétique du travail : une articulation entre poièsis et praxis
Invitée : Agnès Lontrade, Esthétique, Université Paris 1.
Deux perspectives concernant les rapports de l’art et du travail seront envisagées dans la conférence : d’une part, la façon dont les artistes réfléchissent la question du travail social dans leur propre pratique, tout en interrogeant leur statut et leur place dans l’économie de l’art (Duchamp, Fluxus, Internationale situationniste, Francis Alÿs...), d’autre part, le paradigme esthétique et artistique du travail dans la double optique de l’utopie du travail libéré et de la libération du travail (Malévitch, Marcuse, Dewey, André Gorz, Maurizio Lazarrato...). Penser le travail dans l’art pour introduire, à titre critique, l’art dans la vie sociale sont les deux faces d’une même volonté de ne pas séparer la poièsis de la praxis, mais aussi de ne pas diluer l’idée d’une esthétique du travail dans les nouvelles formes du capitalisme artiste.
Agnès Lontrade est maître de conférences en esthétique et philosophie de l’art à l’Université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne, École des Arts de la Sorbonne, membre de l’Institut ACTE. Elle a rédigé, sur l’esthétique du XVIIIe siècle et ses implications critiques, Le plaisir esthétique. Naissance d’une notion (2004) et codirigé deux ouvrages portant sur la critique d’art : Juger l’art ? (2009), La critique : art et pratique (2016). Ses recherches portent également sur le courant philosophique du pragmatisme et ses influences sur la création contemporaine, les pratiques de l’oisiveté et du désœuvrement, les formes esthétiques et artistiques du don. Elle a codirigé, à ce sujet, avec Jacinto Lageira, le n° 28 de Figures de l’art, « Esthétique du don. De Marcel Mauss aux arts contemporains » (postface d’Alain Caillé, 2015), et prépare actuellement en codirection l’ouvrage Les valeurs esthétiques du don (Éditions Mimésis, automne 2019).
Séance 12 (14 décembre) : Séance prospective / Bilan d’étape animé par les étudiants
Invité : Michel Gomes, filière cinéma, plateformes, studio, tournages… sous réserve
Séances 13 et 14 (Journée d’études, vendredi 5 février) :
Rendez-vous : Centquatre, Incubateur de start up, 5 rue Curial, entrée du public ; 104 rue d’Aubervilliers, Paris 19. Métro Riquet.
Invités : Juliette Navis, Raymond Galle, Martha Ponça, Michel Gomes
En accompagnement : Spectacle JC, adaptation de Au cœur de la monnaie (vendredi 31 janvier) ; exposition Raymond Galle ; festival Les Singulier-es (29 janvier-13 février)…
https://www.104.fr/fiche-evenement/raymond-galle-exposition.html
Festival Les Singulier.e.s : https://www.104.fr/fiche-evenement/festival-les-singulier-es-2021.html
Patrice Baubeau, est maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université Paris Nanterre, rattaché à l’IDHES (UMR 8533). Ses principaux domaines de recherche portent sur les banques, les monnaies et les crises (y compris les guerres) en France et en Europe au XIXe et au XXe siècle, sur lesquels il a publié plus d’une centaine d’articles et de contributions. Il a aussi confronté ces questions à leur traitement littéraire ou cinématographique et s’est intéressé à leur propagande.
Martial Poirson est professeur des universités à l’Université Paris 8. Il est directeur des masters Arts de la scène et Projet artistique et culturel international et de l’équipe de recherche « Histoire, politique et socio-économie des arts, de la culture et de la création » (E.A. 1573). Il est également visiting professor en Cultural Studies à New York University. Spécialiste d'histoire culturelle, il a notamment travaillé sur les représentations de l'économie. Il a publié plusieurs ouvrages et a coordonné plus d’une trentaine de volumes et de revues sur le théâtre, la littérature, le cinéma, les musées, l’économie politique et les cultures populaires. Il est également commissaire d’exposition et dramaturge.
Yann Toma est artiste-observateur à l’ONU (New York), professeur des universités à Paris 1 Panthéon-Sorbonne, membre titulaire de l’Institut ACTE et directeur du Master in Arts and Vision (MAVI). Il coordonne de multiples projets de recherche liés aux ODD. Son travail croise l’énergie et les réseaux, tout autant que l’éthique. En tant qu’artiste, ses projets expérimentent une redistribution de l’énergie entre l’artiste et ses publics, ce dernier dépendant du public pour produire l’œuvre de sorte qu’elle soit véritablement commune (Dynamo-Fukushima, Grand Palais, septembre 2011 - Human Energy, Tour Eiffel, décembre 2015 – Human Greenergy, Cité interdite de Pékin, octobre 2016 – Organisation des Nations Unies New York 2017) et orientée vers la transformation. Il est membre de l’Institut de Hautes Etudes pour la Science et les Technologies (IHEST). Il est également président de Sorbonne Développement Durable, structure réticulaire collaborative pour l’innovation de la formation et de la recherche des sciences humaines, juridiques et sociales sur le développement durable.