Introduction au mémoire de:
LEA NATRELLA
L’art et la science. L’artiste est ailleurs, il est une entité mobile et insaisissable. La notion de déroute peut être multiple et de genres différents, par exemple accidentelle, pri-vée, « comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d'une machine à coudre et d'un parapluie » Au cours de ma vie de nombreux événements permis de prendre différentes directions artistiques. J’ai vécu jusqu’à aujourd’hui en com-pagnie de personnes malades et j'ai vu des souffrances qui m’ont marqué à vie. La maladie de mon père et de certains de mes proches est une déroute importante dans mon travail. Je me suis concentrée sur l’aspect direct de la peau et de la tactilité que celle-ci dégage. Les événements tels que la maladie, la mort sont des faits courants, mais sont des déroutes per-cutantes en art. Dès lors, comment le déclin de l’être humain suscite-t-il chez autrui un re-tour à la réalité ? Comment l’être humain peut-il faire face à une souffrance physique et morale ?
Matérialité psychédélique. Lors d’une visite au musée du Quai Branly, j’ai décou-vert les œuvres d’artistes Aborigènes d’Australie. Cette découverte fut pour moi une révé-lation. Notamment le travail de Petyarre Kathleen, Rêve du lézard diable de montagne2 réa-lisé en 1962. J’ai eu une fascination pour ces réalisations, j’ai alors lié ma pratique et je me suis inspirée de leur technique. Aujourd’hui, je réalise des motifs mêlant points et traits peints sur l’envers de carrelages, céramiques. J’utilise une charge de recouvrement qui est la couleur noire puis réalise une percée des couleurs avec mes motifs. Je joue avec des contrastes chromatiques qui me permettent de faire ressortir des éléments précisément. Mon support interfère dans mes gestes via les trames déjà présentes. Mon travail essentiel-lement géométrique suscite un questionnement : comment exploiter la faillibilité de l’œil à travers des illusions d’optique ou des jeux optiques ?
Dans une première partie, nous verrons l’intégralité des recherches et des créations touchant à l’épiderme, au psychisme humain, à la dégénérescence de la perception, l’obsession du point et le rapport chromatique associé à celui-ci ainsi que l’élaboration de concept par fusion de notion.
Exploration. L’expérience humaine qu’est le voyage dans un pays étranger au mien a « réveillé ma conscience » créant ainsi une confiance considérable, qu’elle soit person-nelle ou bien professionnelle. L’organisation dans mon expérience est à la fois le maître-mot, mais également un paradoxe. Un verbe d’action va guider ma journée, mais je ne pourrais jamais déterminer certainement ce qu’il va produire sur ma vie. Le fait de m’être imposées des verbes d’action quotidiennement m’a obligé à m’ouvrir aux autres, m’a per-mis de développer mes arguments et défendre mes idées/concept de création au sein d’un milieu artistique, mais également de sensibiliser des personnes à mon art. En effet, j’ai dû davantage parler de mon art, trouver des mots sur mes créations pour qu’elles puissent être recevables par tous. J’ai également découvert une nouvelle culture, une langue. Une simple action comme demander son chemin prend une toute autre dimension. Tout cela m’a per-mis de prendre en maturité, le fait de vivre loin de ma famille impact également, on ne peut jamais prévoir ce qui va se passer pendant notre départ. Parfois, nous devons faire face à des difficultés et trouver une alternative pour continuer de vivre l’expérience dans son in-tégralité.
Cette expérience, au-delà de son aspect artistique, m’a également fait prendre conscience de la vie active : vivre seule, se gérer, budgétiser mes dépenses. Faire face à des imprévus, devoir se coordonner avec mes intermédiaires (les banques) afin de pouvoir sub-venir à ses besoins. La conversion est également omniprésente notamment lorsque nous voyageons dans un pays où la devise est différente de celle du pays dans lequel nous vi-vons. La bourse a pris une position décisive sur certaines de mes journées. On ne tient pas forcement compte du cours de l’argent lorsque nous vivons dans un pays ou notre monnaie est celle que nous gagnons. Mais quand on choisit un pays comme l’Angleterre la monnaie devient déterminante. Mon art a grandi et s’est développé au fil des jours par mon ressenti les diverses émotions, mais aussi grâce aux rencontres et aux découvertes.
Ma pratique s’est émancipée tout en gardant l’aspect tactile, l’environnement et le monde qui nous entoure a pris une place prépondérante dans mon travail. Instaurant alors des fusions entre des notions différentes comme l’art et la nature, l’art et les médias, l’art et les réseaux qu’ils soient sociaux, médiatiques ou bien de transport. Choisir un pays avec des difficultés politiques permet une autre vision du monde. En France, nous avons les actes des gilets jaunes, mais en Angleterre il y a les débats liés au Brexit. J’ai également fait le choix d’ouvrir une voie vers la publication d’un journal de bord, d’une expérience immersive. Ce projet détaillé permettrait à des personnes manquant de confiance en soi ou souhaitant simplement relever des challenges de repousser leurs limites. Cette expérience a été enrichissante. Le processus des 90 verbes d’action 1 par jour est un procédé que je compte développer et m’imposer dans d’autres futurs voyages, plus ou moins longs.
Mon immersion et l’évolution de mes projets ont soulevé un certain nombre de questionnements. En effet, s’imposer des normes de création peut-il engager la création vers de nouvelles formes ? L’expérience est-elle un concept artistique, ou bien un mode opératoire artistique ?
Dans une seconde partie, nous verrons les impacts que peut avoir une expérience immersive dans un autre pays et ce qu’elle peut impliquer dans la création et dans mon im-plication envers le monde et la biodiversité à travers le développement durable.
Mes créations s’insèrent dans une thématique intitulée Entre déroutes optiques et matérialités tactiles qui permet de découvrir à travers une multiplicité et une diversité de médiums, des travaux cherchant à attirer le spectateur aussi bien sur le domaine du visuel, de la perception, de l’optique que sur l’aspect tactile et le sens du touché. Mon travail s’inspire de l’art aborigène d’Australie. J’utilise des céramiques tramé afin d’accentuer le relief de mon motif. Mon intérêt est d’exploiter la faillibilité de l’œil à travers des illusions d’optiques ou des jeux optiques. C’est pour cela que mon travail est essentiellement géométrique. Ma recherche soulève également la notion de développement durable à travers mon second médium qui est le pléxiglas. La tactilité ne s’arrête pas simplement à la matière plastique mais relève aussi de l’épiderme. Mes photographies se développent autour de la thématique du Pli et de ce labyrinthe créer par celui-ci. Mais également de l’aspect tactile et visuel de la peau au fil des années.