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Introduction au mémoire de: 

LAURA LECATELIER

 

L'INFRONTIERE

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     Initialement,  ce  mémoire  devait s’appeler Le Sablier sans  fin,  tout comme  l’œuvre principale qui le constitue et qui a motivé son entreprise. Mais il s’est trouvé être différent, d’une autre consistance que ce que j’avais envisagé. Si ce fameux sablier demeure l’axe nord de ma boussole durant cette exploration, le cœur de mes aspirations, autre chose en a émergé. Les sentiers parcourus étaient les trames invisibles d’une histoire bien plus grande, celle de l’absolu. Que j’ai souhaité tisser à l’image de la géographie d’un archipel 1. Car ma pensée comme un archipel se compose d’un ensemble d’îles/idées isolées en surface mais reliées dans les profondeurs, par le même feu qui les a engendré. Un feu qui lui-même se nourrit d'une pensée que je nomme l'infrontière. Aussi les lignes qui vont suivre seront à cette image, éclatées. À mi-chemin entre le mémoire,  le manifeste,  l’autobiographie,  l’essai  métaphysique  et  le  carnet  de  voyage spirituel. Intimement lié aux domaines de la philosophie, de la métaphysique, de la physique ou encore à la poésie, ce projet tente de définir autant les implications spirituelles de cette oeuvre que les implications techniques de cet absolu. Un absolu que j'ai essayé de distiller au travers de plusieurs niveaux de lecture établis autant dans le contenu textuel, que dans l'architecture même de ce mémoire.

 

    Cette  chimère  synthétique  m’aura  permise  de  rallier  des  choses  en  suspens  qui 

gravitaient dans mes réflexions et ma pratique depuis bien longtemps. J'ai enfin eu ici la possibilité de créer des passerelles, de rallier des disciplines, d'invoquer des dialogues qui m'habitaient et renouer avec un passé antique par une relation étroite à la littérature. Cette méthode fondée sur un principe analogique quasi mallarméen, a pour but de dévoiler l'essence commune des idées que je convoque et d'exploiter leur force poétique. Il est une humeur, un esprit, un goût à la jonction de toutes ses disparités qui est le droit fil me permettant me tisser ma propre histoire. Cette quête du récit ultime se déploie donc tout au long de ce mémoire comme un miroir diffractant de mon cheminement introspectif et initiatique. 

J’aurais  aimé  pouvoir  tout  en  dire,  atteindre  la  perfection  de  l’achèvement,  mais comme  vous  le  comprendrez  rapidement,  c’est  le  propre  de  l’absolu  que  d’échapper  en définitive à une ultime formulation. Il ne peut y avoir que des bribes de vérités éparses, des éléments démembrés, errants, que je vais m'employer malgré tout à faire exister dans un même  univers.  Aussi  gageons  de  considérer  ce  qui  suit  comme  l’inachèvement  de  cette grande ambition qui m’habite.

 

     Le récit de cette vaste exploration est axé en deux grandes parties. La première approfondira sous la forme d’une vaste exégèse  les réflexions théoriques qui ont émergé de ma pratique et sera agrémentée d’œuvres antérieures et de pensées autour du sablier. Pour appuyer ces propos, j’engage dans ce triptyque de l’incomplétude, une réflexion sur la condition  humaine  et  la  nécessité  de  s’accomplir  en  étant  en  perpétuelle  recherche  de quelque chose. Car c’est vers ces notions que m’a mené la théorisation de ma pratique et la mise au jour de mes motivations profondes. J'y fixe également toute la teneur du terme infrontière, qui se fait lien entre toutes ses îles/idées que j'emploie. La deuxième partie quand à elle sera dévolue à ma pratique artistique et technique de ce fameux sablier. Ici seront exposés l’état de la recherche en cours et les détails de cette œuvre ultime que j’aspire à réaliser. Une série d’études sur les matériaux et les techniques potentiellement employées viendront étayer ce panorama. J'inclus ici également un rouage plus intime de ce projet qui va donner une tout autre portée à cette entreprise. Sera présente également, l'issue plastique et métaphysique de cette exploration.

 

    Je me dois de préciser : ce mémoire a été engagé avec un désir ardent de tout interroger, d’excaver la moindre racine jaillissant de l’imaginaire de ce sablier infini et de rallier sous sa coupe, tous ces territoires de pensées et de réflexions qui abreuvent ma 

pratique  plastique  et  ma  pensée.  D’en  déterrer  chaque  méandre.  C'est  une  poursuite  au confin d'une sensibilité que je peine à faire valoir dans le monde qui m'entoure. Car à l’heure où je me confronte avec de plus en plus de difficutés à un empire de la raison, de la mesure, de la technologie et du virtuel, il me semble plus que jamais d’actualité de raviver de la cendre quelques préoccupations antiques existentielles, toujours aussi abstraites et stimulantes, afin questionner le faire, le vivre, le présent et le futur dans une entité organique et instinctive. Il s’agit par là de penser, repenser, définir et redéfinir certains concepts qui ont tant été source créative depuis l’aube de la pensée humaine afin de repenser l’apparente complétude de mon univers.

 

   Ce  mémoire  se  veut  le  narrateur  de  ce  cheminement  que  j’ai  entrepris  il  y  a maintenant près de deux ans. Il s’agit pour moi de partager cet éclatement qui m’habite et de donner à voir la complexité du processus de création et de réflexion quand tout semble impossible à cette tâche. Là où une telle quête pourrait paraître stérile et absurde, je la vois comme un moteur d'innovation. Ce sont les rêves, les imaginations absurdes et les impossibles qui créent la réalité demain. Quand l'humain entre en création, il modèle des procédés, des processus pour rendre l'irréel, réel. Tout comme la Lune qui paraissait impossible à atteindre il y a un siècle, alors qu'aujourd'hui nous sommes déjà aux portes de la conquête martienne. J'aspire à renouer avec cet esprit de conquête propre à la nature humaine, à déployer cet esprit d’exploration et d’inciter le lecteur à éprouver son infrontière au travers  d’ «  un fantastique  voyage  réalistico-imaginaire  », une  aventure  existentielle, l’odyssée de mon âme.

 

 

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